Le Cyber-harcèlement – lorsque le rire devient la face cachée du mal.
Des enfants qui se chamaillent dans le préau sont des situations anodines. Mais quand les chamailleries deviennent du harcèlement et lorsque les disputes de « cours de récré’ » se transforment en règlements de compte via les réseaux sociaux, comment gérer les débordements?
C’est sans doute ce que se demande la mère de Marion Fraisse, écolière française de 13 ans. Marion a mis fin à ses jours le 13 février 2013 après avoir subi de nombreux harcèlements. Elle était la risée de ses camarades, à l’école pour commencer, puis les insultes l’ont suivies jusque dans les murs de sa maison. Elle recevait de nombreux textos, e-mails ou encore messages via Facebook après les cours. Malgré la multitude et la sévérité des menaces, ses parents n’étaient pas conscients de l’ampleur des répercutions tragiques que ce harcèlement aurait sur leur fille.
Effectivement, les enfantillages et les mesquineries dans la cour d’école sont monnaie courante et ont toujours existé[1]. Les autorités scolaires ont d’ailleurs tendance à passer l’éponge sur ces événements. « Allez Madame, ça va se tasser » répétait le principal à la maman de la petite Marion, quand celle-ci demandait à ce que sa fille soit changée d’établissement. Comment connaître la limite de tolérance de chacun de ces adolescents ?
Le cyber-harcèlement est défini comme « un acte agressif, intentionnel perpétré par un individu ou un groupe d’individus au moyen de formes de communication électroniques, de façon répétée à l’encontre d’une victime qui ne peut facilement se défendre seule ».
Bien que dramatiques, les cas comme celui de Marion Fraisse restent heureusement isolés. Le harcèlement à l’école ne semble pas avoir augmenté. Selon une étude faite en Belgique[2], il touche un élève sur trois. Ce chiffre, bien qu’alarmant, stagne. Ce qui a réellement changé ces dernières années, ce sont les méthodes de persécution. Grâce des outils comme Facebook, Instagram, Twitter, Snapchat, Whatsapp et d’autres encore, le harcèlement se poursuit encore en dehors de la cours de récréation.
Avec l’utilisation des médias numériques, la diffusion de textes, d’images et de films malveillants ou diffamatoires via téléphone mobile ou Internet a augmenté. Le cyber-harcèlement se différencie du harcèlement dit « classique » par trois points principaux :
- La diffusion massive et instantanée
- Prolongement du harcèlement jusqu’au domicile
- Le harceleur peut rester anonyme en utilisant un pseudo
Ces trois différenciations rendent le cyber-harcèlement encore plus angoissant que le harcèlement physique. Il peut être lourd de conséquences par le fait que la victime peut être ridiculisée en un temps très court aux yeux d’une sphère publique très large. De plus, la victime n’a aucun lieu où être en sécurité. Lors de harcèlement « classique », une fois chez lui, l’enfant peut se sentir en sécurité au sein de sa sphère familiale. A l’ère du numérique, l’enfant est traqué jusque dans sa propre maison et ne peut jamais « échapper » à ses agresseurs. Avec les médias sociaux, l’agresseur se cacher derrière un pseudo. Ceci rend son identification compliquée et ajoute une part d’angoisse pour la victime.
Le cyber-harcèlement a des conséquences graves sur le bien-être et la santé mentale des victimes mais aussi des agresseurs. Il existe un consensus général selon lequel ces conséquences seraient plus importantes que celles du harcèlement traditionnel en raison des caractéristiques particulières de ce type de violence (anonymat, pouvoir de dissémination et public élargi etc.). Contrairement à la violence ordinaire, face à l’écran, les victimes sont très souvent seules et ne peuvent pas être aidées par leurs camarades.[3]
Afin d’éviter de telles conséquences ou de terribles drames comme le cas de la jeune Marion, il est impératif pour les jeunes d’être sensibilisés à ce genre de pratiques. Ils doivent dès leurs premières utilisations de smartphone ou d’ordinateur être conscients que le cyber-harcèlement existe et qu’il faut s’en protéger. Il faut également, pour les parents et le personnel scolaire, mettre en place une zone de confiance avec les enfants et être à leur écoute afin qu’ils osent discuter si un cas de harcèlement se présentait à eux. Un parent doit laisser son enfant avoir sa sphère intime intacte mais ils doivent être informés sur les dangers et les conséquences du cyber-harcèlement. Sur la Toile tout est public et tout est éternel.
[1] Desor D, Math F. (2015). Comprendre la violence des enfants, L’apport des neurosciences. Dunod. Paris. 243 p.
[2] GALAND B., HOSPEL V., BAUDOIN N., « Prévalence du harcèlement en Fédération WallonieBruxelles : Rapport d’enquête », GIRSEF, 2014.
[3] http://www.nonauharcelement.education.gouv.fr/que-faire/faire-face-au-cyberharcelement/
Sources :
Desor, D, Math, F. (2015). Comprendre la violence des enfants, L’apport des neurosciences. Dunod. Paris. 243 p.
http://www.jeunesetmedias.ch/fr/opportunites-et-risques/reseaux-sociaux.html. Consulté le 7 décembre 2016
http://www.nonauharcelement.education.gouv.fr/que-faire/faire-face-au-cyberharcelement/. Consulté le 7 décembre 2016
http://tempsreel.nouvelobs.com/l-enquete-de-l-obs/20131114.OBS5469/traitee-de-pute-de-boloss-marion-13-ans-s-est-suicidee.html. Consulté le 7 décembre 2016
Citation : Smith, P.K., Mahdavi, J., Carvalho, M., Fisher, S., Russel, S., & Tippett, N. (2008). Cyberbullying: Its nature and impact in secondary school pupils. Journal of Child, Psychology and Psychiatry, 49,p 376
Rédaction : Clélia Panchaud
Relecture : Eloïse Oberson, Corinne Pittet-Del Tufo, Evelyne Panchaud
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