Communiquer sur les réseaux sociaux n’est pas un acte anodin

Pour les marques, les réseaux sociaux représentent un potentiel gigantesque en termes de communication et d’image. En effet, de nombreuses marques investissent des budgets importants pour communiquer à travers ces canaux. Ce phénomène a pris une ampleur telle que le métier d’influenceur a vu le jour. Il y a quelques années encore, cette profession n’existait pas et maintenant elle fait pleinement partie de l’écosystème des réseaux sociaux.

De plus en plus de personnes publient tout et n’importe quoi sur les réseaux sociaux, que ce soit leur repas du jour, en passant par leurs états d’âme, leurs coups de gueule etc. Publier peut aller très vite. En quelques secondes, quelques lignes sont posées accompagnées ou non d’un hashtag, d’une image et, en un clic, c’est envoyé !

Dans un premier temps, sans aller dans des considérations juridiques, il n’est peut-être pas opportun d’annoncer un départ en vacances qui rime avec logement inhabité…

D’autre part, bien que la liberté d’expression soit garantie par la Constitution fédérale (art. 16 Cst), publier sur les réseaux sociaux peut entraîner des suites.

Sous l’angle du droit civil

De nombreuses personnes publient des photos où apparaissent d’autres personnes. Mais un cliché publié sans le consentement de l’intéressé peut constituer une atteinte à la personnalité (art. 28 CC) et entrainer, outre une cessation de l’atteinte, une réparation (tort moral, action en dommages-intérêts, remise du gain, art. 28a CC).

Le travailleur a aussi, vis-à-vis de son employeur, un devoir de diligence, de fidélité et de confidentialité (art. 321a CO). Une violation de ces devoirs peut entrainer une demande de réparation et peut aussi conduire au licenciement de l’employé. Dans un ATF 4A_558/2009, le Tribunal fédéral a confirmé un licenciement immédiat d’un cadre qui dénigrait son employeur auprès de la clientèle.

Sous l’angle du droit pénal

Utiliser un pseudo n’est pas une garantie d’anonymat.

On aurait donc tort de se sentir à l’abri et tout puissant derrière son écran et ce, d’autant plus qu’il n’y a pas que sous l’aspect civil que les publications peuvent avoir des conséquences. En effet, il est pénalement punissable de calomnier (art. 174 CP), diffamer (art. 173 CP), menacer (art. 180 CP), injurier (art. 177 CP), discriminer une personne ou un groupe de personnes à cause d’une race, d’une ethnie ou d’une religion donnée (art. 261bis CP), … même si cela s’effectue par le biais d’un réseau social.

L’art. 174 CP réprime la calomnie, soit le comportement de celui qui, connaissant la fausseté de ses allégations, aura, en s’adressant à un tiers, accusé une personne ou jeté sur elle le soupçon de tenir une conduite contraire à l’honneur, ou de tout autre fait propre à porter atteinte à sa considération.

L’art. 173 CP, à savoir la diffamation, diffère de la calomnie en ce sens que la personne qui tient les propos diffamatoires ne connaît pas la fausseté des informations qu’elle propage.

Si la peine pour injure se monte à 90 jours-amende au plus, celle-ci peut atteindre une privation de liberté de trois ans, en cas de menaces ou de calomnie.

Attention avec les « like » car ils ont notamment pour effet de diffuser le post.

Publier n’est donc pas à prendre à la légère, et, simplement « liker » peut aussi avoir des conséquences pénales.

Aussi bien dans l’infraction de diffamation que dans celle de calomnie, propager une accusation ou un soupçon est déjà punissable. Il n’y a donc pas besoin d’en être directement l’auteur. Le simple fait de propager des propos diffamatoires constitue en soi une infraction pénale.


Activer le bouton «j’aime» ou «partager» d’une publication attentatoire à l’honneur sur Facebook peut constituer une infraction si la publication est ainsi communiquée à un tiers.


communiqué de presse du Tribunal fédéral du 20 février 2020

Dans son communiqué de presse du 20 février 2020, le Tribunal fédéral rappelle que, dans un arrêt 6B_1114/2018 du 29 janvier 2020, il a retenu qu’ « Activer le bouton « j’aime » ou « partager » d’une publication attentatoire à l’honneur sur Facebook peut constituer une infraction si la publication est ainsi communiquée à un tiers. Le Tribunal fédéral confirme sur ce point un jugement du Tribunal cantonal du canton de Zurich. Ce dernier devra réexaminer si, en l’espèce, ce sont bien des propos diffamatoires que l’accusé a propagés ».

Avec un like ou en partageant une publication, on s’engage déjà. Un simple like ne doit donc pas être considéré comme un acte personnel mais comme un acte public.

Quelques cas dans le viseur de la justice

Dans son arrêt 6B_644/2020 du 14 octobre 2020, le Tribunal fédéral a condamné un conseiller national pour discrimination raciale
(art. 261bis CP) car il avait publié, en 2014, sur son compte Twitter et Facebook « On en redemande ! » après une fusillade dans une mosquée.

Il y a, en outre, le cas du restaurateur valaisan qui a subi un déferlement de haine sur Facebook car la politique de l’établissement était de facturer les carafes d’eau. Au vu du nombre de commentaires et d’interactions avec la publication, c’est plus de 700 personnes qui font l’objet d’une enquête pénale pour cette seule affaire. Plus d’infos.

Parfois, il est possible de se retrouver devant la justice en pensant bien faire. C’est notamment le cas d’une dame qui a partagé une vidéo d’un enfant maltraité, pensant que cela permettrait de retrouver le tortionnaire. Au final, elle se retrouve mise en prévention pour représentation de la violence (art. 135 CP). Plus d’infos.

D’autres infractions telles que la pornographie (art. 197 CP), … peuvent être réalisées sur les réseaux sociaux mais le présent article, ayant pour but de sensibiliser, n’a pas pour vocation d’être exhaustif.

David PAPAUX

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